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Yves III (1551-1577), le premier marquis d'Allègre

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Portrait d'Yves III

Yves III était né  le 19 novembre 1523, 3ème fils de Gabriel et de Marie  d'Estouteville il devient baron d'Allègre en 1551, succédant à son frère Gilbert. Il est aussi titré  "baron de Blainville (Normandie), vicomte de Mézy (calvados) baron de saint André en la Marche (Eure)".
Petit rappel, frères et sœurs :
François de Tourzel, Baron d'Allègre (1515-1543)
Gilbert de Tourzel, Baron d'Allègre (1521-1551)
Christophe Ier de Tourzel, (1525-1580), père du futur Christophe II. Il s'est lui-même donné le titre de marquis d'Allègre à la mort de son frère Yves III.
Antoine de Tourzel, Seigneur de Meilhaud  (1530-1573), son fils Yves sera le futur Yves IV de Tourzel.

Voir l'arbre généalogique d'Yves II de Tourzel

Il se marie le 26 septembre 1551 avec Jacqueline d'Aumont fille de Pierre d'Aumont et de Françoise de Sully. Il n'en n'aura pas d'enfant et vivra séparé d'elle.

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Jacqueline d'Aumont


Yves III se distingua d'abord depuis son château de Blainville en Normandie dont il était baron par héritage de son père. Il participa activement aux côtés du Duc de Guise à la prise de Rouen qui était aux mains des huguenots (protestants).
En 1558 il acquiert, moyennant 3 000 livres la charge de sénéchal du Puy que vient de créer Henri Il.
En 1560 il devient Gentilhomme Ordinaire de la Chambre du Roi.
Dès 1562, il lutte contre les protestants en Normandie.
Date importante : 1563, il est ambassadeur extraordinaire auprès du Pape.
Il est fait Chevalier de l'Ordre du Roi, Capitaine de 50 hommes de ses ordonnances en 1566.

Yves III marquis d'Allègre

15  Mars 1576 : pour services rendus au royaume par les barons d'Allègre, le roi Henri III érigea la baronnie d'Allègre en marquisat.

 

Yves III contre les protestants à  Issoire

En 1577, le roi ordonna une expédition contre la ville d'Issoire qui était une place de sûreté depuis le traité de Beaulieu. Depuis son château de Meilhaud, proche d'Issoire, le marquis d'Allègre donna de nombreux renseignements aux ducs d'Anjou, de Nevers et de Guise chargés par le roi de chasser les huguenots de la ville. Il participa activement à la bataille. Il commandait l'artillerie et fut grièvement blessé à la cuisse par un tir d’arquebuse..


Yves III proposé en otage des protestants

Le prince de Condé qui avait déjà demandé la liberté de conscience en France et la réhabilitation des victimes de la Saint Barthélémy depuis l'Allemagne, entra avec son armée en France. Faisant moult ravages pillages et autres actes de barbarie sur son passage, l'armée de Condé se dirigeait sur Paris quand le roi Henri III et la reine-mère lui proposèrent de traiter : sept millions de livres pour évacuer la France ! On ne put en réunir que mille deux cent que les allemands acceptèrent, mais avec des garanties en plus. Parmi ces garanties, il y avait cinq otages : l'un d'eux fut le baron d'Allègre. Mais, effrayé à l'idée de subir la condition de prisonnier dans "le triste et sauvage pays d'Allemagne, à la merci d'un peuple aussi barbare que celui de Germanie", YVES III, d'un âge avancé, malade, habitué à la vie somptueuse de la cour de France, proposa d'envoyer comme otage à sa place son neveu, le futur Yves IV. Yves III n'avait pas eu d'enfants et il avait fait de son neveu son héritier. C'est ainsi que, à 17 ans, Yves IV le futur marquis d'Allègre vécut quatre ans d'une dure captivité en Allemagne au château d'Heidelberg.

 

Histoire de famille et réglements de comptes : les Tourzel et les Duprat (premier épisode)

Les héritages très importants étaient souvent sources de conflits interminables qui se réglaient souvent devant des tribunaux mais parfois aussi par des duels, des assassinats.
Ainsi, les familles Duprat et Tourzel, rapprochées par le mariage, se livrèrent une sanglante bataille. En 1565, les Duprat attaquèrent, à Paris, Yves III qui porta plainte. Peu de temps après, Antoine d'Allègre seigneur de Saint-Just et de Meilhaud, frère de Yves III croyant à un guet-apens, tua, toujours à Paris, son cousin François Duprat.
"Meilhaud lui porta de son épée dégainée un coup sur la tête, un autre au travers du corps et l'abattit aux pieds des deux femmes. Puis, comme le malheureux, relevé par les siens, avait encore la force, appuyé sur eux de traverser la rue et de se traîner jusque chez un barbier-chirurgien dont le logis était en face, l'un des compagnons d’Antoine d'Allègre fit un retour offensif et lui asséna un dernier coup d'épée qui l'acheva."
Antoine d'Allègre fut emprisonné à la Conciergerie aussitôt après le meurtre (début juin 1565). Par lettres de rémission (juin 1565) du roi de France, il obtint sa libération. Il dût s'engager à servir pendant six ans le roi et à verser dix mille livres à la famille Duprat.
Cette sentence bénigne ne pouvait qu'appeler une vengeance de la part des Duprat. Guillaume Duprat s'en chargea quelques années après, à Paris.
"Ayant laissé venir sa barbe fort longue, il se promenait par la ville, en habit d'avocat, ne cessant d'épier le seigneur de Meilhaud depuis l'hôtel d'Hercule où il logeait.
Un jour que ce dernier revenait du Louvre, il eut la fâcheuse idée de s'arrêter juste en face l'hôtel d'Hercule et, se tournant contre le mur, il voulut satisfaire un besoin naturel. Duprat accourut et le poignarda dans le dos."
Mais, la terrible guerre que se livrèrent les Tourzel et les Duprat n'était pas terminée ! (Prochain épisode sous Yves IV fils d' Antoine d'Allègre).

Yves III n'avait pas eu d'enfants, ce qui provoqua une furieuse course à la succession  parmi tous les prétendants. Il avait fait de son neveu, Yves IV, son héritier cela se passait le 17 mai 1576, le même jour qu'il devait le remplacer comme otage à Heidelberg. Le deal devait être : tu prends ma place d'otage, en contre partie je te fais mon héritier.


Yves III, assassiné à Allègre

Jacqueline d’Aumont, marquise d'Allègre, épouse de Yves III, se disant maltraitée par son mari quitta le château pour se retirer auprès de ses parents. C'est alors que le marquis se mit en quête d'une autre dame. Celle-ci, le sachant marié, se moqua de lui. Cela déplut fort à notre homme qui ne se fit pas faute d’insulter ladite dame ... qui se vengea. A quelque temps de là, le marquis reçut une lettre de la dame disant qu'elle viendrait le trouver pour lui témoigner toute son affection. A cet effet, il était prié de laisser ouverte la fausse porte de son château (la poterne côté nord). A l'heure dite, trois hommes habillés en femme entrèrent dans sa chambre et le tuèrent. C'était le 13 juillet 1577. On ne découvrit jamais les assassins.

"Yves d'Allègre, frère d'Antoine, fut encore tué plus tragiquement. Sa femme, soeur du maréchal de camp ou de France d'Aumont, dame vertueuse et prudente, étant maltraitée par lui, se retira chez ses parents; ce que voyant, le sieur d'Allègre rechercha en mariage une autre grande dame, laquelle sachant qu'il était marié, elle se moqua de lui; ce qui l'indisposa si fort qu'il tint des propos, avec beaucoup de jactance, contre l'honneur de cette dame, ce qui excita celle-ci à en tirer vengeance. Voici comment elle s'y prit. Quelques temps après, le sieur *** remit une lettre au sieur d'Allègre, sous le nom de cette dame, par laquelle...il était prié de vouloir bien laisser la fausse porte de son château ouverte certain jour qu'elle lui désigna; qu'elle viendrait le trouver vers les neuf heures du soir, accompagnée d'un homme et de deux filles de chambre, et qu'elle désirait entrer par la porte indiquée, pour n'être vue de personne. Le sieur d'Allègre, ravi de cette lettre, lui mande qu'elle serait très bien reçue. L'heure indiquée arrivée, il ordonna à ses domestiques de se retirer dans leurs chambres et de n'en point sortir qu'il ne les appelât, et luimême se mit au lit, où il n'eut guère demeuré, que trois hommes déguisés en femmes entrèrent dans sa chambre. L'une d'elle feignit d'être sa maîtresse, s'approcha de lui pour l'accoler, et tenant une courte dague sous sa robe lui en lança plusieurs coups dans le corps. Les autres fausses demoisselles se jetèrent également au même instant sur lui, et le blessèrent si fort qu'il en mourut ayant reçu trente sept coups. L'exécution terminée, les trois individus se retirèrent, sans que jamais on ait pu découvrir les assassins". (in le manuscrit d'Issoire)

C'est sa veuve Jacqueline d'Aumont qui hérite du château d'Allègre. Son neveu Yves IV, désigné comme héritier par Yves III était encore prisonnier en Allemagne en juillet 1577. Il reviendra de sa captivité en septembre 1581. Il sera nommé gouverneur de la ville d'Issoire le 22 avril 1590 par le roi Henri IV, il y résidera dans la maison dite « Maison Charrier ».
Yves III n'ayant pas eu de descendance, la succession est un peu houleuse (c'est peu dire) car Christophe Ier (marié à Antoinette Duprat), frère d’Yves III, réclame de succéder à son frère comme marquis d’Allègre. Commence alors une période confuse avec une succession de procès et de "coups bas".  (voir plus loin : la succession d'Yves III)

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